Erreur de surface : peut-on obtenir une baisse de loyer ?
Un locataire peut-il obtenir une diminution de loyer si la surface réelle du logement est inférieure à celle mentionnée dans le bail ?
Oui, mais sous conditions. Il doit respecter une procédure précise, et notamment formuler une demande amiable avant toute action en justice.
Voici une illustration, tirée d’une histoire vraie!
Une erreur de surface… et une demande de baisse de loyer
« La forme, c’est le fond qui remonte à la surface », écrivait Victor Hugo.
Une maxime qui prend tout son sens dans cette affaire de bail d’habitation, où les locataires vont apprendre, à leurs dépens, que le respect des formes prévues par la loi est indispensable.
Le 20 avril 2018, Monsieur et Madame Z concluent un bail d’habitation non meublé avec une bailleresse, pour une maison située dans la région de Cannes.
Le 27 décembre 2018, la bailleresse leur délivre un congé pour vendre, à effet au 3 mai 2019.
Mais les locataires, installés depuis seulement quelques mois, contestent ce congé… et en profitent pour demander une diminution du loyer, au motif que la surface réelle du logement est inférieure de plus de 5 % à celle mentionnée dans le bail.
Un congé annulé, mais une baisse de loyer rejetée
Sur le congé pour vente, le débat est vite tranché :
La bailleresse reconnaît que le logement n’était pas meublé, ce qui rend la durée du bail de trois ans, et non d’un an.
Le congé est donc nul.
Mais sur la demande de baisse de loyer, elle s’y oppose fermement.
Elle argue que les locataires n’ont pas, avant de saisir le juge, tenté une démarche amiable, comme le prévoit la loi.
Le cadre juridique : l’article 3-1 de la loi du 6 juillet 1989
Les conditions pour demander une diminution de loyer
L’article 3-1 de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989 prévoit :
Lorsque la surface habitable réelle est inférieure de plus d’un vingtième (soit plus de 5 %) à celle indiquée dans le bail, le locataire peut demander une diminution de loyer proportionnelle à l’écart constaté.
Mais cette demande ne peut être judiciaire qu’à certaines conditions :
-
Une demande amiable préalable adressée au bailleur
-
En cas d’absence de réponse dans un délai de deux mois, le locataire peut saisir le juge dans un délai de quatre mois
UNE Décision de la cour d’appel : demande irrecevable
La cour d’appel donne raison à la bailleresse :
- Les locataires n’ont jamais formulé de demande amiable avant de saisir le juge.
- Par conséquent, leur demande est irrecevable.
UN Pourvoi en cassation des locataires
Mécontents, les locataires forment un pourvoi en cassation.
Leur argument
Ils soutiennent que l’absence de tentative amiable ne devrait pas priver le locataire de la possibilité de saisir le juge.
L’Arrêt de la Cour de cassation du 20 avril 2023
La Cour de cassation rejette le pourvoi.
Elle confirme l’interprétation de la cour d’appel :
Le juge ne peut être saisi qu’à condition qu’une demande amiable préalable ait été adressée au bailleur, et qu’un délai de deux mois se soit écoulé sans réponse ou sans accord.
Il ne s’agit donc pas d’une simple formalité, mais d’une condition de recevabilité de l’action.
LA Leçon à retenir pour les locataires… et les bailleurs
Mon conseil d’avocate en droit immobilier
Si vous êtes locataire et souhaitez demander une baisse de loyer liée à une erreur de surface :
- Adressez une demande écrite et datée à votre bailleur
- Attendez deux mois : sans réponse ou en cas de refus, vous pourrez saisir le juge
- Respectez le délai de quatre mois pour engager une action en justice
Si vous êtes bailleur, soyez vigilant à la surface mentionnée au contrat : elle doit correspondre à la surface habitable réelle.