Commission d’agence et droit de préemption

Juin 21, 2022 | Immobilier, Vente immobilière | 0 commentaires

l’agent immobilier est-il payé en cas de préemption ?

Beaucoup de professionnels de l’immobilier se posent la question : si une collectivité exerce son droit de préemption sur un bien, l’agent immobilier conserve-t-il la commission prévue au mandat, ou doit-il se contenter d’une rémunération réduite selon le prix fixé par le juge ?

Les faits : un mandat de vente et une préemption

Le 24 juillet 2007, Monsieur Z confie à Monsieur A, agent immobilier, la vente de plusieurs parcelles de terrain.

Deux mandats de vente sont signés, prévoyant une commission de 6 % HT calculée sur le prix net vendeur réellement perçu.

L’intervention de la communauté urbaine

La communauté urbaine exerce son droit de préemption.

Les parcelles, initialement promises à 80 €/m², sont finalement cédées, après jugement d’expropriation, pour des montants bien inférieurs (11,53 € et 14,99 €/m²).

Résultat : l’agent immobilier perçoit une commission de 126 000 €, au lieu des 790 000 € espérés.

Les recours de l’agent immobilier

Estimant subir un préjudice, l’agent tente d’obtenir le complément de sa commission :

  • d’abord auprès de la communauté urbaine, qui refuse,

  • puis en engageant la responsabilité du notaire.

La décision de la cour d’appel

La cour d’appel lui donne raison : elle condamne le notaire à verser près de 590 000 € de dommages et intérêts.

Selon l’agent, le notaire aurait dû mentionner dans la déclaration d’intention d’aliéner une commission calculée sur la base du prix convenu avec l’acheteur (80 €/m²).

Le pourvoi en cassation : la défense du notaire

Le notaire forme un pourvoi.

Il soutient qu’il ne pouvait indiquer qu’une rémunération conforme au mandat, soit 6 % HT du prix réellement perçu par le vendeur.

La décision de la Cour de cassation (16 mars 2022, n°20-17.028)

Le rappel de la loi Hoguet

La Cour rappelle que :

  • en vertu de l’article 6 de la loi Hoguet, seul le mandat de vente justifie légalement la rémunération de l’agent,

  • l’agent immobilier ne peut recevoir aucune somme autre que celle prévue au mandat.

Application au cas d’espèce

Le notaire n’avait commis aucune faute en reproduisant dans la DIA la clause prévue au mandat.

La Cour casse l’arrêt d’appel : l’agent immobilier ne pouvait pas prétendre à une rémunération supplémentaire.

Conclusion : un enseignement pour les agents immobiliers

Cet arrêt met en lumière un risque pratique :

  • lorsque la commission est calculée uniquement sur le prix net vendeur, une préemption peut réduire considérablement la rémunération,

  • ne pas prévoir de plancher de rémunération dans le mandat peut donc être risqué.