“Prenez tout très au sérieux, à l’exception de vous-même.” disait Rudyard Kipling
Je vous raconte cette semaine l’histoire d’un vieux Monsieur, devenu veuf, qui souhaitait récupérer le logement donné à bail à ses locataires.
Mais ceux-ci ne le prennent pas au sérieux.
Le 1er octobre 2014, Monsieur B conclut un contrat de bail avec Monsieur et Madame L, mettant à leur disposition une maison dans la région du Nord.
Le 2 décembre 2019, il leur fait délivrer un congé aux fins de reprise pour habitation à son profit, le tout à effet au 30 septembre 2020.
Il souhaite en effet se rapprocher de sa famille.
Cependant, les locataires ne quittent pas les lieux à la date fixée.
Et, trois mois plus tard, ils assignent leur bailleur en nullité du congé.
Le juge des contentieux de la protection leur donne toutefois tort, tout comme la Cour d’appel.
L’un comme l’autre estiment le congé valable.
Mécontents, les locataires forment un pourvoi en cassation.
Ils soutiennent trois arguments :
- La justification du caractère réel et sérieux de la décision de reprise était édicté à peine de nullité.
Autrement dit, le fait de ne pas justifier dans l’acte d’huissier de la réalité de la reprise rend le congé inefficace.
- Les justificatifs du caractère réel et sérieux de la reprise doivent être contemporains de la délivrance du congé (soit six mois avant la date de reprise),
- Le droit de reprise du bailleur suppose l’habitation effective des locaux à titre de résidence principale.
Selon les locataires, la cour d’appel aurait dû rechercher si le bailleur avait effectivement l’intention d’établir sa résidence principale dans ce logement.
Le bailleur dispose en effet d’une maison dans le sud de la France, dans laquelle, il vivait jusque-là.
À votre avis, ont-ils obtenu gain de cause ?
La réponse est non.
Dans cet arrêt du 12 octobre 2023 (RG n° 22 – 18. 580), la Cour de cassation rejette le pourvoi.
Elle approuve la cour d’appel d’avoir considéré que :
- La prescription de la justification dans le congé du caractère réel et sérieux de la décision de reprise n’est pas édictée à peine de nullité,
- Le bailleur pouvait justifier par des éléments postérieurs du caractère sérieux de son projet de reprise, au moment de la délivrance du congé, du logement à titre de résidence principale
Deux enseignements à retenir :
- la reprise doit avoir lieu à titre de résidence principale,
- des actions postérieures peuvent être prises en compte pour justifier de la réalité du projet au moment du congé.