DTU non respecté : pas d’indemnisation sans dommage
Le non-respect d’un DTU suffit-il à engager la responsabilité de l’entreprise ?
On pourrait le penser, tant les DTU sont des références incontournables du secteur du bâtiment. Mais en droit, tout dépend du contrat et des conséquences réelles de l’écart.
Voici une illustration de ce sujet, tiré d’une histoire vraie.
Une toiture non conforme au DTU 43.3
Un maître d’ouvrage découvre que la toiture réalisée sur son bâtiment ne respecte pas le DTU 43.3 (toitures en tôle d’acier nervurée avec revêtement d’étanchéité).
Une expertise judiciaire confirme cette non-conformité.
Le maître d’ouvrage fait réaliser des travaux de remise aux normes, à ses frais, puis demande le remboursement de ces coûts à l’entreprise titulaire du marché, qui avait sous-traité les travaux.
L’entreprise mise en cause conteste
L’entreprise refuse de payer, avançant deux arguments :
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Le DTU 43.3 n’était pas mentionné dans le contrat,
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Aucune malfaçon ou désordre n’est apparu sur l’ouvrage.
La cour d’appel condamne, la Cour de cassation casse
En appel : responsabilité retenue
La cour d’appel retient la responsabilité de l’entreprise, estimant que les DTU, en tant que règles de l’art, sont automatiquement opposables aux professionnels, même sans mention explicite au contrat.
En cassation : absence de fondement juridique
La Cour de cassation, dans son arrêt du 30 juin 2021 (RG n° 20-15.277, 20-15.349, 20-17.033), annule la décision.
Elle rappelle les fondements juridiques de la responsabilité civile :
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Responsabilité contractuelle (article 1231-1 du Code civil) : suppose un manquement à une obligation contractuelle. Or ici, le DTU n’était pas contractuellement visé.
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Responsabilité délictuelle (article 1240) : suppose un dommage. Or ici, aucun dommage n’est établi.
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Garantie décennale : non applicable en l’absence de désordre affectant la solidité ou la destination de l’ouvrage.
À retenir : la mention du DTU dans le contrat est essentielle
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Un DTU non mentionné dans le marché ne peut être opposé à l’entreprise pour engager sa responsabilité contractuelle.
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En l’absence de désordre réel, aucune indemnisation ne peut être obtenue sur un simple écart aux règles de l’art.
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La vigilance dans la rédaction du contrat est donc cruciale : c’est elle qui permet, en cas de litige, de fonder une demande de réparation.