Bail d’habitation et délai du commandement de payer

Juil 2, 2024 | Bail, Les chroniques de la Justice | 0 commentaires

« Ne pas confondre vitesse et précipitation ».

Je vous raconte cette semaine l’histoire d’un bailleur qui souhaitait que son locataire indélicat quitte son logement le plus vite possible.

La loi du 27 juillet 2023 cette fameuse loi Kasbarian qui a défrayé la chronique à l’été 2023, va dans son sens.

En effet, grâce à cette loi, le délai imparti au locataire indélicat pour payer sa dette en application du commandement de payer qui lui est délivré a été réduit à six semaines (c’était deux mois avant).

Il fait donc délivrer à son locataire ce fameux commandement et le locataire ne régularise pas dans le délai imparti par la loi.

Le bailleur saisit donc le tribunal pour faire constater la résiliation du bail et obtenir l’expulsion.

En effet, dans son contrat est inséré une clause résolutoire indiquant qu’à défaut de payer sa dette dans le délai du commandement, le bail est résilié.

Cependant, devant le tribunal, le locataire soulève un argument juridique de poids :

La loi du 27 juillet 2023 ne serait pas applicable un contrat de bail qui a été conclu avant son entrée en vigueur.

Autrement dit, le commandement de payer, en ce qui lui a imparti un délai de six semaines et non, deux mois pour acquitter sa dette, serait nul.

Et ainsi la résiliation du bail et la demande d’expulsion ne pourraient plus être poursuivies.

Ce n’est pas magique évidemment, ça ne libère pas le locataire de toute obligation mais ça obligerait le bailleur à recommencer sa procédure à zéro.

Le tribunal de proximité de Trévoux, dans l’Ain, est perplexe face à une telle question.

Il décide donc, comme le code de l’organisation judiciaire et le code de procédure civile, le lui permettent de soumettre la question, sous forme de demande d’avis, à la Cour de cassation.

À votre avis, qu’a décidé la Cour de cassation ?

La loi s’applique-t-elle aux contrats en cours au moment de son entrée en vigueur ?

La Cour de cassation fait application de l’article 2 du Code civil :  la loi ne dispose que pour l’avenir et n’a point d’effet rétroactif.

La loi du 27 juillet 2023 ne comporte aucune disposition qui déroge à cet article.

Dans ces conditions, la Cour de cassation juge que cette nouvelle loi ne s’applique pas aux contrats en cours qui demeurent régis par les stipulations des parties et tels qu’encadrés par la loi en vigueur au jour de la conclusion du bail.

 A retenir

    Tous les contrats en cours au 28 juillet 2023 demeurent régis par l’ancienne loi et donc par le délai de deux mois pour acquitter sa dette à compter du commandement de payer visant la clause résolutoire.

    Et c’est ainsi que de nombreuses procédures vont devoir être abandonnées par les bailleurs en l’état et réitérées dans les termes de l’ancienne loi.