Bail commercial et charges indues

Mai 13, 2025 | Bail, Les chroniques de la Justice | 0 commentaires

Payer n’est pas renoncer : un preneur réclame le remboursement de charges

Un peu de pédagogie :

Ne sont récupérables sur le locataire que les charges, travaux, impôts et taxes autorisés par la Loi et faisant l’objet d’une mention expresse de transfert dans le bail commercial.

En voici une illustration à travers cette histoire.

 

 

Bail commercial et répétition de l’indu : une affaire de rédaction imprécise

Cette semaine, je vous parle d’un locataire commercial qui, après neuf années de paiement de charges, conteste leur validité et demande leur remboursement à son bailleur.

Le bailleur, bien entendu, s’y oppose vigoureusement.

Un bail commercial assorti d’une promesse de vente

En janvier 2006, Monsieur Z donne à bail à la société S un local commercial, moyennant un loyer de 488 € net de charges.

Le contrat contient également une promesse unilatérale de vente au bénéfice du preneur, valable pendant toute la durée de la location.

En avril 2011, Monsieur Z décède, laissant trois enfants pour lui succéder.

Réclamation du preneur après le décès du bailleur

La société S assigne les héritiers en :

  • Réitération authentique de la vente,

  • Répétition des charges indûment versées,

  • Compensation du solde avec le prix de vente.

Mais le tribunal puis la cour d’appel rejettent la demande de remboursement. Leur raisonnement : avoir payé ces charges pendant neuf ans prouverait qu’elles étaient reconnues comme dues par le preneur.

La Cour de cassation rappelle la force du contrat

Mécontent, le preneur forme un pourvoi en cassation, en s’appuyant sur le contrat de bail.

Il affirme qu’en l’absence de clause claire, certaines charges n’étaient pas dues, peu importe qu’elles aient été payées pendant des années.

Le paiement ne vaut pas reconnaissance de dette

Dans son arrêt du 13 février 2025 (RG n°23-17.978), la Cour de cassation casse l’arrêt d’appel :

Les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites.

Elle précise qu’avant la loi Pinel, les parties étaient libres de répartir les charges, impôts et taxes, mais seules les stipulations écrites du bail peuvent déterminer ce qui incombe au preneur.

Le paiement répété ne vaut ni reconnaissance, ni renonciation à contester.

Un conseil aux rédacteurs de baux commerciaux

La loi Pinel impose aujourd’hui de :

  • Détailler précisément les charges, impôts, taxes et redevances,

  • Indiquer clairement à qui elles incombent.

À défaut, ces charges ne peuvent pas être imputées au preneur, même si celui-ci les a réglées par le passé.