Bail d’habitation et décence du logement
Mon logement n’est pas décent. Eh bien, le locataire n’a qu’à partir s’il n’est pas content !
Je vous raconte cette semaine l’histoire de bailleur qui ne voulait pas faire des travaux dans leur appartement donné à bail.
Le 8 novembre 2013, Monsieur D loue à Monsieur et Madame R un appartement quatre pièces au loyer de 760 € dans la région de Sète.
En 2015, Monsieur Madame R, qui vivent dans cet appartement avec leurs trois enfants, déplore des problèmes d’humidité.
Ne parvenant pas à obtenir l’intervention de leur bailleur, ils cessent de payer leur loyer.
Le 21 décembre 2015, ni une ni deux, le bailleur le fait délivrer un commandement de payer (2283,55 €) visant la clause résolutoire.
Les locataires ne régularisent pas la dette dans le délai imparti par la loi (à l’époque deux mois).
En septembre 2018, le bailleur saisit le tribunal pour :
- voir constater l’acquisition de la clause résolutoire
- ordonner l’expulsion
- condamner les locataires à une indemnité d’occupation équivalente aux arriérés de loyer et charges.
Le tribunal :
- Constate la résiliation du bail
- Refuse prononcer l’expulsion
- condamne les locataires au paiement des arriérés de loyer et charges
- Déclare le logement loué non décent,
- condamner le bailleur à faire réaliser les travaux de décence du logement
- Condamne le bailleur au paiement de dommages et intérêts aux locataires.
Le bailleur fait appel.
Et grand bien lui en fasse puisque la cour d’appel infirme le jugement sur deux points :
- En ce qu’il a condamné le bailleur à réaliser des travaux de descente du logement.
Le bail étant résilié, les locataires étaient devenus sans droit ni titre. Il n’avait donc plus de droit à revendiquer un logement décent.
- En ce qu’il a condamné le bailleur à verser des dommages-intérêts aux locataires au titre du trouble de jouissance
Elle constate que le logement était décent à l’entrée dans les lieux en 2013 et que des travaux et factures avec les règlements 2017.
Et enfin, elle constate qu’il n’y a plus de demande d’expulsion, les locataires ayant quitté le logement.
Mécontents, les locataires forment un pourvoi en cassation.
Ils plaident que le bailleur est tenu de délivrer à son locataire un logement décent pendant toute la durée du bail.
Les rapports produits démontrant l’indécence du logement à partir de 2015, ils avaient le droit à une indemnisation.
À votre avis, ont-ils obtenu gain de cause ?
La réponse est oui.
Dans cet arrêt du 16 mai 2024 (RG n° 23 – 12. 438) la Cour de cassation casse l’arrêt d’appel.
La cour rappelle que le bailleur est tenu de délivrer au locataire un logement décent (article 1719 du Code civil et article six de la loi du 6 juillet 1989).
Et seul un cas de force majeure peut l’en exonérer, ce qui n’est pas le cas ici.
Deux conseils :
- Suspendre le paiement de son loyer pour obtenir du bailleur qu’il fasse des travaux n’est pas une bonne idée. C’est le plus sûr moyen de voir le bail est résilié. Et seule l’inhabitabilité du logement peut faire obstacle à la résiliation du bail.
Alors comment agir : en saisissant la commission départementale de conciliation des baux d’habitation pour tenter d’obtenir amiablement les travaux et en cas d’échec en saisissant la justice pour suspension des loyers et pour condamnation sous astreinte à réaliser des travaux,
- Le bailleur doit entretenir le logement pendant toute la durée du bail, seules les petites réparations sont à la charge du locataire.