Durée d’un pacte de préférence

Nov 22, 2024 | Les chroniques de la Justice, Vente immobilière | 0 commentaires

« Engagez-vous ! qu’ils disaient » disent les romains dans Astérix.

Ce qui nous permet de mesurer toute la force d’un engagement qu’on peut regretter.

 Je vous raconte cette semaine l’histoire d’une venderesse qui avait consenti un pacte de préférence mais ne souhaitait plus l’honorer.

 Madame Z est propriétaire d’une maison dans la région d’Aix-en-Provence, sur laquelle, en juillet 1990, elle consent à Monsieur et Madame P un pacte de préférence.

 Le 16 mai 2011, la venderesse informe les bénéficiaires du pacte de préférence de son intention de vendre à Monsieur T moyennant un prix de 200 000 €.

 Les bénéficiaires lui répondent qu’ils entendent faire usage de leur droit de préférence et ainsi acheter l’immeuble.

 Cependant lors d’un rendez-vous chez le notaire le 13 septembre 2011 Monsieur T agissant pour le compte de la venderesse indique que celle-ci ne signera pas l’acte authentique de vente avec les époux P.

 Des discussions s’ensuivent et la venderesse décède l’année suivante, sans que la vente ait été régularisée.

 Monsieur et Madame P saisissent alors la justice et sollicitent à l’encontre de la succession la vente forcée.

 Le tribunal tout comme la cour d’appel estime que les époux P ont valablement exercé leur droit de préférence. La cour d’appel dit qu’il y a vente en présence d’un accord sur la chose et sur le prix.

 Mécontent, Monsieur T forme un pourvoi en cassation. Il soutient deux arguments :

  • Le pacte de préférence qui impose au promettant, lorsqu’il souhaite vendre le bien, de donner la préférence au bénéficiaire du pacte à un prix prédéterminé dans le contrat est une atteinte au droit de propriété lorsque la durée de son engagement est excessive.
  • Le pacte de préférence était nul car il ne comportait aucun terme.

 

À votre avis, a-t-il obtenu gain de cause ?

La réponse est non.

Dans cet arrêt du 25 septembre 2024 (RG n° 23 – 14. 777), la Cour de cassation rejette le pourvoi.

 Elle rappelle que les engagements perpétuels ne sont pas sanctionnés par la nullité du contrat. Chaque contractant peut mettre fin à celui-ci à tout moment sous réserve de respecter le délai de préavis prévu au contrat ou à défaut un délai raisonnable.

 En l’absence de résiliation du pacte de préférence par la venderesse, celui-ci devait s’appliquer.

Un conseil :

Si depuis l’ordonnance du 10 octobre 2016, les engagements perpétuels sont interdits, la jurisprudence admet la validité des pactes de préférence sans terme défini. Ce peut être source d’insécurité juridique pour le vendeur et l’idéal est d’éviter les promesses sans terme défini.

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