Oh bon sang, on m’a vendu une partie commune de copropriété je vais faire annuler la vente, pour cause de vente de la chose d’autrui.

Je vous raconte cette semaine l’histoire d’un couple qui acquiert divers lots de copropriété dans un immeuble situé à proximité de Saint-Étienne.

L’acquisition, faite en mars 2015, est prometteuse puisqu’il s’agit d’un appartement triplex en avec cave en sous-sol et deux terrasse privatives.

Cependant, quelques temps après la vente, les acquéreurs se plaignent de différents désordres.

Ils sollicitent la désignation d’un expert qui dépose son rapport en octobre 2017.

Les acquéreurs demandent alors l’annulation de la vente estimant que la venderesse leur a vendu une partie commune, c’est-à-dire une partie ne lui appartenant pas, mais appartenant au syndicat des copropriétaires.

En effet, en réalisant des travaux d’agrandissement de son appartement en 2009, la venderesse avait effectivement annexé une partie commune.

Mais, il s’agissait à l’époque d’une petite copropriété familiale.

En février 2015, soit un mois avant la vente, l’assemblée générale des copropriétaires avait approuvé les travaux et la modification de l’état descriptif de division.

La vente était donc intervenue le 11 mars 2015 et le notaire modifiait le jour même l’état descriptif de division de la copropriété.

Cependant, cet acte modificatif de l’état descriptif de division ne constatait pas la cession des parties communes à la venderesse, il faisait donc l’objet d’un modificatif en juin 2015.

Mais cet acte sera annulé par la suite.

Juridiquement parlant, au moment de la vente au couple en mars 2015, la venderesse leur avait effectivement vendu une partie commune.

Or, l’article 1599 du Code civil énonce que la vente de charges de la chose d’autrui est nulle.

Cependant, le tribunal a rejeté la demande du couple estimant que personne n’était venu contester leur propriété sur la partie commune.

La Cour d’appel elle-même a jugé que l’argument était pour le moins surprenant dès lors que personne ne venait contester leur droit de propriété sur l’ensemble des lots acquis et au contraire il était admis de l’ensemble des parties en cause.

Le couple est donc débouté tant en première instance qu’en appel.

Toutefois il n’en démord pas et forme un pourvoi en cassation

Il soutient qu’en l’absence d’acte valide reconnaissant leurs droits sur le lot issu de parties communes, il n’était pas définitivement à l’abri d’une action en revendication du syndicat des copropriétaires.

 

À votre avis, ont-ils obtenu gain de cause ?

La réponse est non.

 

Dans un arrêt en date du 14 septembre 2023 (RG n°22-18.504) la Cour de cassation rejette le pourvoi.

Elle approuve la cour d’appel d’avoir considéré que l’assemblée générale avait lors de sa réunion de janvier 2015 approuvé à l’unanimité les travaux de construction de la demanderesse sur l’assise de la copropriété et que l’état de descriptif de division modifié et son rectificatif étaient conforme à cette décision.

Elle approuve donc la cour d’appel d’avoir considéré que toutes les parties étaient d’accord antérieurement à la vente pour transférer la propriété des parties communes à la venderesse puis à ses acquéreurs.

Il n’y avait donc aucun risque d’éviction pour les acquéreurs malgré l’annulation des actes modificatifs de description dont ils étaient d’ailleurs seuls à l’origine.

Ce faisant, la Cour de cassation rappelle que la nullité de la vente n’est pas automatique mais subordonnée à un véritable risque d’éviction. En l’occurrence il n’y avait pas puisque le syndicat des copropriétaires avait donné son accord pour la cession.

Moralité : plutôt que d’adopter une stratégie compliquée, les acheteurs auraient été plus avisés de simplement solliciter l’indemnisation des préjudices subis du fait des travaux mal réalisés en ce s’en prenant directement au constructeur.