Congé à un locataire âgé
Il a les moyens de se reloger ! Qu’il s’en aille !
C’est en tout cas ce que pensait le bailleur !
Je vous raconte cette semaine l’histoire d’une bailleresse qui voulait se débarrasser de son locataire âgé de … 71 ans !
La SCI S a fait l’acquisition d’un immeuble, après le décès de sa propriétaire en 1993.
Elle entreprend de le transformer et de le rénover, au fur et à mesure du départ des locataires.
Mais tel le village gaulois, l’un d’eux résiste encore et toujours à l’envahisseur.
Un jour, la SCI n’en peut plus, et délivre un congé pour motif sérieux et légitime à son locataire, le 7 décembre 2018, à effet au 10.06.2019.
Le motif est qu’elle souhaite restructurer le logement, comme elle l’a fait avec tous les autres appartements.
Le locataire ne quitte toutefois pas le logement à la date fixée.
La SCI saisit le juge des contentieux de la protection en validation du congé.
Le juge valide le congé et ordonne l’expulsion.
Le locataire interjette appel.
Il plaide que ses ressources étant inférieures au plafond prévu par la Loi, la SCI aurait dû lui faire une offre de relogement.
Il indique que les revenus à prendre en compte sont, non pas ceux de l’année fiscale précédant le congé mais ceux des douze mois précédant la délivrance du congé.
La SCI lui a fait parvenir 7 annonces, mais c’est insuffisant car le bailleur ne s’est pas renseigné sur l’acceptation de son dossier par un autre bailleur.
Dans ces conditions, la Cour d’appel annule le congé.
Mécontent, la SCI forme un pourvoi en cassation.
Elle plaide que les revenus à prendre en compte sont ceux de la dernière année civile écoulée avant la délivrance du congé.
À votre avis, a-t-elle obtenu gain de cause ?
La réponse est NON.
Dans cet arrêt du 24/10/2024, (RG n°23-18.067), la Cour de cassation rejette le pourvoi.
Elle rappelle qu’en application de la loi du 6.07.1989, le bailleur, qui veut se séparer de son locataire âgé de plus de 65 ans et dont les ressources sont inférieures au plafond pour l’attribution des logements locatifs conventionnés, doit lui proposer un logement correspondant à ses besoins et ses possibilités.
Et les revenus à prendre en compte sont ceux des 12 mois précédant le congé.
Ici, les ressources du locataire étaient inférieures au plafond, le bailleur devait lui proposer un relogement effectif.
Faute de l’avoir fait, le congé est nul.
Et c’est reparti pour un tour !
Un conseil :
Le conseil constitutionnel a estimé que cette disposition était conforme à la Constitution. Il est donc indispensable pour le bailleur de respecter strictement cette loi, sauf à encourir la sanction prévue à savoir la nullité du congé et par suite le renouvellement du bail.
Et s’agissant d’un bailleur personne morale, c’est 6 ans.