Décès et charges de copropriété

Mai 6, 2025 | Copropriété, Les chroniques de la Justice | 0 commentaires

Qui ne dit mot consent : quand les héritiers tardent à se manifester

Un peu de pédagogie : 

Après le décès, les biens du défunt sont la propriété indivise de ses héritiers. Ce sont donc ces derniers qui vont devoir régler les charges de copropriété afférentes à ce logement. Chaque co-indivisaire sera tenu de payer sa quote-part, en fonction de ses droits dans cette indivision. Les héritiers peuvent toutefois renoncer à la succession, moyennant le respect de formalités. C’est la question illustrée par cette vidéo.

Une affaire de charges de copropriété impayées et de succession non réglée

Cette semaine, je vous raconte l’histoire d’un syndicat des copropriétaires qui souhaitait récupérer les charges impayées d’un copropriétaire décédé… en les réclamant à ses héritiers.

Mais les héritiers, peu réactifs, n’étaient pas prêts à assumer cette dette.

Un copropriétaire décède en laissant une dette importante

En juin 2017, Monsieur C, propriétaire de plusieurs lots dans une copropriété à Alès, décède. Il laisse derrière lui trois enfants.

Problème : il était redevable de 78 000 € de charges de copropriété au moment de son décès.

Le syndicat des copropriétaires, via son syndic, souhaite obtenir la condamnation des héritiers au paiement de cette somme.

Mise en demeure et délai pour se prononcer sur la succession

Les héritiers sont mis en demeure puis sommés de se prononcer sur la succession : l’accepter, la refuser ou l’accepter à concurrence de l’actif net.

Les articles 771 et 772 du Code civil leur laissent deux mois pour répondre. En cas de besoin, un délai supplémentaire peut être demandé au président du tribunal judiciaire.

Mais ici, les héritiers restent silencieux.

Action en justice du syndicat des copropriétaires

Faute de réponse, le syndicat assigne les héritiers devant le tribunal judiciaire d’Alès pour obtenir leur condamnation au paiement des charges.

Et il obtient gain de cause.

Les héritiers contestent en appel

En appel, les héritiers expliquent avoir renoncé à la succession : deux en 2019, le dernier en 2021. Ils estiment donc ne pas devoir les dettes de leur père.

Mais la cour d’appel confirme la décision : la renonciation est intervenue hors délai, ils sont donc réputés avoir accepté la succession.

Résultat : ils doivent régler près de 92 000 € de charges actualisées.

Un pourvoi en cassation rejeté

Mécontents, les héritiers saisissent la Cour de cassation. Ils plaident que, tant qu’aucune décision judiciaire définitive ne les a déclarés acceptants, ils pouvaient encore renoncer.

L’importance du respect du délai légal

Dans son arrêt du 5 février 2025 (RG n°22-22.618), la Cour de cassation est claire :

À défaut de réponse dans les deux mois et en l’absence de demande de délai, l’héritier est réputé acceptant pur et simple. Il ne peut plus ensuite ni refuser la succession, ni l’accepter à concurrence de l’actif net.

La cour d’appel a donc statué conformément à la loi.

Un conseil pratique pour les syndics de copropriété

En cas de décès d’un copropriétaire, il est essentiel de :

  • Mettre rapidement en demeure les héritiers de se positionner sur la succession,

  • Surveiller les délais pour lancer, si besoin, une procédure de recouvrement des charges dans les meilleures conditions.