Décès et cotitularité du bail

Déc 19, 2024 | Bail, Les chroniques de la Justice | 0 commentaires

Et puisque je vous dis que je n’en veux pas de cet appartement !

Je vous raconte cette semaine la mésaventure d’un homme poursuivi pour le paiement du loyer d’un appartement attribué à son épouse et qu’il n’habitait plus.

 En 2001, Monsieur et Madame Z concluent un contrat de bail avec une société HLM.

 Ils vivent dans l’appartement, situé en région parisienne, avec leurs deux enfants.

 En 2011, Monsieur quitte le logement et indique au bailleur la nécessité de mettre le bail au seul nom de Madame.

 En 2013, dans le cadre de la procédure de divorce des époux Z, une ordonnance de non-conciliation attribue le logement à Madame.

 En 2016, Madame Z décède. Ses deux enfants habitaient avec elle.

 Les deux enfants, l’un mineur, l’autre majeur, continuer à y vivre mais ont des difficultés à payer le loyer.

Un avenant est signé avec le père.

La société d’HLM assigne le père en résiliation du bail et expulsion et lui demande le paiement du loyer ainsi qu’un surloyer, compte tenu de ses revenus.

 Le tribunal fait droit aux demandes de la société et condamne Monsieur au paiement d’un loyer surloyer de 58 000 €.

 Monsieur Z relève appel de la décision.

 Pendant la procédure d’appel, les enfants libèrent le logement.

 Ils interviennent devant la cour d’appel, pour plaider que par suite du décès de leur mère, le logement devait être attribué aux enfants qui vivaient avec elle depuis plus d’un an comme prévu par les textes de loi.

 Et qu’aucun surloyer ne pouvait être appliqué compte tenu de leurs ressources.

 La Cour donne raison aux enfants, estimant que le logement devait leur être attribué par suite de la manifestation de son désintérêt pour le logement par le père.

 Elle annule le surloyer, perte sèche s’élevant désormais à 65 000 € pour le bailleur.

 Mécontent, le bailleur forme un pourvoi en cassation invoquant les règles de la cotitularité du bail.

    À votre avis, a-t-elle obtenu gain de cause ?

    La réponse est oui.

     Dans cet arrêt du 4 juillet 2024 (RG n° 2024 – 01. 05 43), la Cour de cassation casse l’arrêt d’appel.

     Elle rappelle que :

    •  La séparation des époux, de fait ou sur autorisation du juge, ne remet pas en cause la cotitularité du bail portant sur le logement qui a servi effectivement à l’habitation commune,
    • Le conjoint survivant bénéficie d’un droit exclusif sur le logement ce qui prive les descendants qui vivent avec le défunt de tout droit locatif,
    • le conjoint survivant peut renoncer à ce droit pour permettre aux descendants de bénéficier du transfert du bail

     Ici, Monsieur Z n’avait pas expressément renoncé à ce droit après le décès de son épouse et n’avait pas mis fin au bail.

     Il était donc redevable du loyer et des charges éventuellement du surloyer compte tenu de ses ressources jusqu’à libération des lieux.

     Un conseil :

    Ne jamais laisser pourrir la situation. En pareil cas, il convient de prendre rendez-vous avec le bailleur social pour évoquer clairement la situation.