Promesse de vente et vileté du prix
Dit c’est dit !
Dédire est impossible.
Je vous raconte cette semaine l’histoire d’un promettant qui ne voulait plus promettre.
Alors il revient sur son engagement. Mais son cocontractant n’est pas d’accord.
Et là, c’est le drame !
En 1971, Madame C promet à Madame G de lui vendre une parcelle de terrain à Marseille.
Cette promesse est consentie pour quatre ans, avec tacite prolongation jusqu’à un an après la mise en service de la rocade.
Madame C meurt en 1978, son fils recueille la succession y compris cette parcelle.
Monsieur C est partiellement exproprié, la parcelle est alors amputée d’un are.
La bénéficiaire de la promesse, Madame G, décède en 1999, sans avoir levé l’option.
Son fils lui succède.
Par courrier simple, en mars 2011, Monsieur G indique à Monsieur C son intention d’acquérir aux conditions prévues par la promesse de 1971.
Par lettre recommandée avec accusé de réception, en juin 2011, Monsieur C lui répond que la promesse est caduque.
Rien ne se passe pendant cinq ans.
Par lettre recommandée en novembre 2016, Monsieur G indique à Monsieur C qu’il lève l’option.
Bien sûr, Monsieur C n’est pas d’accord. Le prix du marché de la parcelle a en effet atteint des sommes stratosphériques tandis que la promesse limite le prix de vente du bien.
Monsieur G saisit donc la justice pour voir dire la vente parfaite et contraindre Monsieur C à exécuter la promesse et ainsi lui vendre son bien au prix fixé par celle-ci.
La cour d’appel le suit partiellement.
Monsieur C n’avait pas la possibilité de revenir sur l’engagement de sa mère. Il est tenu par la promesse qui fixait un délai d’option jusqu’à un an après la livraison de la rocade.
Or, la rocade avait été livrée en 2016.
En revanche, la cour d’appel refuse d’ordonner la vente forcée, estimant que seuls des dommages-intérêts pouvaient être alloués.
Et s’agissant de la question de la vileté du prix invoqué par Monsieur, la Cour retient l’argument.
La parcelle est devenue constructible et le promettant a reçu plusieurs offres de promoteurs entre 2006 et 2019 dont la dernière s’élève à 2 millions d’euros.
La cour juge donc qu’il ne peut y avoir transfert de propriété au prix actualisé par la promesse soit 126 000 €.
Vous imaginez l’ire du bénéficiaire de la promesse !
Monsieur G forme un pourvoi en cassation, avec deux arguments :
- Le promettant s’oblige définitivement à vendre, sans possibilité de rétractation, sauf stipulation contraire. La vente forcée était donc de droit.
- La vileté du prix s’apprécie au moment de la signature de la promesse.
À votre avis, a-t-elle obtenu gain de cause ?
L’enjeu est colossal !
La réponse est oui.
Dans cet arrêt du 21 novembre 2024 (RG n° 21 – 12. 661) la Cour de cassation casse l’arrêt d’appel.
Elle rappelle que les conventions formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites.
La promesse devait être exécutée et pouvait faire l’objet d’une vente forcée.
Et la vileté du prix s’apprécie au moment de la signature de la promesse.
L’opiniâtreté de Monsieur G a payé !
Un conseil :
Pas de promesse sur des durées trop longues, sans prévisibilité, la promesse peut devenir un piège !